par Deborah Morrison, Directrice générale, Institut canadien des urbanistes (ICU)

Après sept mois passés à m’immerger dans le monde des urbanistes, le Sommet sur l’état des villes canadiennes organisé par l’Institut urbain de Canada a été ma première incursion majeure dans l’écosystème plus large des leaders urbains. Pour sa troisième édition, le Sommet a réuni des centaines de professionnels de l’urbanisme, de décideurs politiques, de chefs d’entreprise, de défenseurs des communautés et d’universitaires afin de mettre en lumière les politiques et les innovations efficaces en matière de développement urbain et d’identifier les possibilités de les déployer à plus grande échelle.

Le thème de cette année, « De meilleurs endroits pour un meilleur Canada : tirer parti du local », a réuni les participants autour d’une vision de communautés plus fortes et plus résilientes et d’une détermination à collaborer pour bâtir une économie nationale plus solide. Je vous encourage à consulter les enregistrements, qui seront bientôt publiés sur le site Web de l’ICU.

En attendant, voici quelques-unes de mes observations personnelles et des points clés à retenir pour les urbanistes et les acteurs communautaires tournés vers l’avenir.

Solutions axées sur le lieu et vitesse de la confiance

Le message principal du Sommet était clair : nous devons nous concentrer sur des solutions adaptées au lieu. Chaque communauté est différente, et la seule façon de libérer la créativité et l’ingéniosité de ses membres est de les impliquer pleinement dans les processus de planification.

L’engagement ne peut progresser qu’à la vitesse de la confiance. La confiance entre les résidents et les institutions. La confiance entre les juridictions. Et la confiance dans des processus transparents, inclusifs et réactifs. Si la construction rapide est actuellement une priorité absolue à tous les niveaux de gouvernement, en particulier lorsqu’il s’agit d’accroître l’offre de logements, il faut d’abord s’attacher à instaurer la confiance au sein de nos communautés.

Petites communautés, grands défis

Il convient également de noter que le Sommet s’est concentré sur l’expérience des petites communautés et des communautés rurales. Les discussions tout au long de la journée ont souligné la nécessité de trouver des solutions adaptées aux petites municipalités qui connaissent les mêmes pressions en matière de logement et d’infrastructures que les grands centres urbains. Il est notamment essentiel de garantir des communautés vivables pour les peuples autochtones, tant dans les réserves qu’à l’extérieur de celles-ci.

Dépasser la pensée dichotomique

L’ancien maire de Toronto, David Miller, a évoqué le malaise croissant suscité par la « collision » entre les intérêts économiques et environnementaux. La réalité est claire : le Canada ne peut se permettre de choisir entre la croissance économique et la résilience climatique. Nous devons cesser de penser en termes de « l’un ou l’autre » alors que les deux sont essentiels à la durabilité à long terme de nos communautés. Nous savons tous ce qui doit être fait, nous connaissons l’urgence de la situation et nous ne devons pas nous laisser intimider par la complexité du problème.

Technologie et innovation

La technologie a également été un thème récurrent tout au long de la journée, avec des présentations perspicaces sur la manière dont l’IA peut éclairer la prise de décision, quelle que soit la taille de la communauté ou les problèmes qu’elle tente de résoudre, et sur la manière dont les ensembles de données peuvent désormais être agrégés pour soutenir tous les aspects de la planification. Plusieurs de ces échanges avaient pour point commun la conviction que nous devons persuader les décideurs de regarder au-delà du PIB pour évaluer la force d’une communauté et pour améliorer la mesure de ce qui a généralement été considéré comme des actifs de croissance intangibles.

Des « présentations éclairs » ont également ponctué la journée afin de présenter des initiatives vraiment inspirantes, telles que :

  • La Natural Assets Initiative (l’initiative des actifs naturels) qui a mis au point une méthode pour mesurer la nature en tant qu’actif infrastructurel;
  • Le projet Mass Culture (mobilization culturelle) qui aide les organisations artistiques à quantifier leur contribution à l’amélioration des résultats communautaires; et
  • Le service mobile d’aide aux communautés proposé par la United Way of Bruce-Grey County.

La question difficile : comment financer tout cela?

La fin de la journée a été consacrée à la réflexion sur les moyens de financer tout cela. Le consensus était que nous ne pourrions pas progresser dans la satisfaction des besoins de la communauté tant qu’il n’y aurait pas de nouveau cadre fiscal accordant davantage de ressources aux municipalités qui supportent la plus grande partie de la charge.

Zita Cobb, fondatrice du Shorefast Institute, a insisté sur ce point lors de sa présentation sur l’économie des lieux. Elle a fait valoir que l’économie canadienne dépendait d’un équilibre équitable entre les marchés (institutions), les gouvernements et les lieux (communautés). À l’heure actuelle, les marchés sont un moteur disproportionné de l’économie, mais l’innovation et la créativité se produisent dans les lieux, et il ne peut y avoir de croissance sans eux. Selon elle, les lieux sont sous-évalués par les marchés, qui cherchent le plus souvent à extraire plutôt qu’à régénérer leur retour sur investissement. Les lieux sont également souvent inexploités par les gouvernements, dont les politiques favorisent le statu quo, alors même que les communautés prospèrent grâce à leur caractère unique. Elle affirme donc que 90 % des communautés canadiennes sont des « actifs bloqués » et qu’il nous appartient de rétablir cet équilibre et de libérer ces actifs.

Ces thèmes de la qualité de vie, de l’accessibilité financière, de la durabilité et de l’équité ne sont pas nouveaux pour les urbanistes. En fait, toutes ces questions étaient au cœur des travaux de nos groupes de travail sur les politiques nationales et ont conduit aux recommandations de l’ICU pour le budget federal 2025. Il était encourageant d’être entouré de personnes travaillant en dehors de la profession d’urbaniste qui partageaient la même vision et les mêmes valeurs et qui se consacraient également à la recherche de nouvelles façons de bâtir de meilleures communautés. Cette journée m’a inspirée et m’a amenée à me demander ce que l’ICU et les urbanistes peuvent faire de plus pour faire avancer ce programme. Si vous avez des idées, n’hésitez pas à contacter notre équipe! Nous avons une toute nouvelle initiative d’éducation au logement qui verra le jour au cours de la nouvelle année et qui, nous l’espérons, permettra aux urbanistes d’acquérir les connaissances et les ressources à jour dont ils ont besoin pour répondre à ce « moment charnière » pour les zones urbaines du Canada.